Whereas the miniature represents closure, interiority, the domestic and the overly cultural, the gigantic represents infinity, exteriority, the public, and the overly natural.[1]
Que les lieux que l’on traverse et qui nous traversent — ceux habités, volés, occupés, oubliés, abandonnés, non planifiés, transformés, rêvés, aménagés, (ré)activés — soient envisagés dans leur complexité.
Pour vivre, pour créer, les citoyens et les artistes passent d’un lieu à l’autre, créant de nouveaux repères, de nouveaux milieux habitables, de nouveaux récits. Quel est le moteur de ces trajectoires sinueuses ? Zones inondables, migrations, déplacements, déménagements, crise du logement, manque d’ateliers ; la mobilité est parfois un privilège, parfois une imposition. Dans ces multiples contextes, que signifie se construire, se relocaliser, se centraliser ? S’établir ou refuser de le faire ?
La saison se termine et toutes les boîtes sont remplies. Il ne reste plus qu’à les sceller et à les identifier. La poussière accumulée se déplace poussée par la brise qui s’infiltre à travers les murs mal isolés de l’atelier. Le son de la pièce n’est plus le même sans les outils et les matériaux qui encombrent les étagères. Les autres ont déjà quitté le lieu. Il reste quelques tabourets et des tables de travail au-dessus desquelles certaines idées sont encore perceptibles. Un regard attentif sur l’espace presque vide. L’esprit du lieu se fait sentir. Un ressenti diffus de ce qui est propre à l’endroit. Des détails particuliers apparaissent en relief. Le genius loci habite ici depuis toujours. Nous accompagnera-t-il ou restera-t-il ici, dissimulé à travers les taches et les trous du plancher ? Quel est celui que l’on trouvera là-bas ? Saurons-nous le percevoir et le cultiver autant qu’on y aspire ?
Présent dans divers champs disciplinaires et sous différentes formulations, le concept de genius loci désigne quelque chose de perceptible à propos d’un lieu dont la présence impose le respect et des actions en cohérence avec lui. Si la prolifération de ses définitions porte à confusion, cette ambiguïté de l’esprit des lieux ouvre la voie à une investigation sur le terrain : un esprit des lieux peut-il servir à guider nos actions ? Cet esprit peut- il nous aider à savoir comment exister en ce lieu ? Comment arriver à le visualiser et à s’en nourrir pour créer des espaces signifiants ? Comment le préserver tout en acceptant sa réalité vivante, floue et changeante ? Que faire de nos échecs à l’observer et à y répondre ? Sous quelles formes incarner son pouvoir dynamique et vers quelles intentions ?
[T]he spirit of place describes reality. To discover exactly what it is and to find the best ways of speaking about it means that we need to become sensitive investigators of places.[2]
Du côté de VCA, les lignes de désir l’entraînent vers un projet d’aménagement de galerie et le poussent à orchestrer une transition majeure. L’immobilisation est proche et les changements d’échelle seront grands. Le besoin de réfléchir par l’art et avec les artistes aux paradoxes d’une telle intention s’impose. Est-il trop tôt pour l’envisager ? Comment s’immobiliser tout en restant mobilisé ? Pourquoi se transformer, vers quoi et comment ?
Les récits de mémoire mobilisant l’espace servent de point de repère : ils permettent aux groupes sociaux de se représenter dans le temps et de construire par leurs récits la temporalité des espaces, de la fondation à la disparition. [3]
D’ici ce grand aménagement, le centre continue d’appuyer des pratiques artistiques qui ont lieu à l’extérieur de la galerie, lesquelles résistent à l’homogénéisation et à la surdétermination des espaces urbains et ceux dédiés à l’art. La mobilité demande un engagement ; une conscience aiguë de l’espace d’inscription (même si la trace du passage est éphémère) ; un élan pour créer avec la réalité du lieu et les conditions matérielles de la pratique. Dans la transition de l’atelier à l’espace public, des aménagements sont, en fin de compte, toujours nécessaires. Répondre au lieu exige d’en faire l’expérimentation ; de là survient parfois l’envie d’une reconfiguration infinie.
Ces trajectoires et ces aménagements, avec les modifications et les assouplissements qui en découlent, affectent tant les trans- formations sociétales que les métamorphoses individuelles. Que ménage-t-on lorsque vient le temps d’aménager ? Quels moyens dédier à la transition, à sa mise en place ? Quels soins apporter pour rendre les lieux habitables ? Quel degré d’attention permet de voir émerger le genius loci ? Quelle configuration choisir et comment la réfléchir, l’éprouver, la fixer ? Dans les grands changements qui se préparent, souhaitons que la trajectoire empruntée nous mène à un développement plein et contenté, et que les questions qui nous immobilisent et nous traversent soient le moteur de notre transformation !
To a child or an ardent adult, the leftover space can confer something of a sporadic, abrupt and unexpected opportunity to craft a moment of urban revelation.[4]
[1]Stewart, Susan. On Longing, Narrative of the Miniature, the Gigantic, the Souvenir, the Collection, Durham : Duke University Press Books, 1993, p. 70.
[2] Brook, « Can Spirit of Place be a guide to ethical building? », dans Fox, Warwick. Ethics and the Built Environment, London : Routledge, 2000, p. 139-151.
[3] Gravereau, Sophie et Caroline « Récits spatiaux : Se raconter socialement en racontent les espaces », Sociologie des espaces. Paris : Armand Colin, 2019, p. 190.
[4] Akerman, Abraham et Ariela Cornfield, « Greening As a Urbain Design Metaphor: Looking in the City’s Soul in Leftover Spaces », Structurist, 2009/2010, p. 30-35
Programmation 2023—25
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